Dans l’océan des jeux post-apocalyptiques, Survival After War arrive avec une promesse simple : faire de la survie une affaire de détails, de décisions lentes et de cicatrices durables. Ce n’est pas un jeu qui crie; c’est un jeu qui chuchote, qui vous laisse compter vos balles en silence pendant que la pluie claque sur une tôle éventrée. Sur PS5, l’expérience se distingue par une atmosphère lourde, un sens aigu du risque-récompense et une progression qui privilégie la débrouille plutôt que la toute-puissance.
Univers et ambiance
Le monde de Survival After War n’essaie pas de réinventer le post-apo, mais il le rend crédible. Les communautés dans lesquelles on passe – des campements bricolés aux villages barricadés – semblent vivre malgré nous. Les PNJ ont des routines, se chamaillent pour une bouteille d’eau, échangent des ragots sur une caravane disparue. La narration, souvent indirecte, s’appuie sur des notes lacérées, des conversations volées et des environnements qui racontent ce qu’ils ont traversé : une école transformée en dispensaire, un stade en champ de légumes, une autoroute en cimetière de caravanes. Rien n’est spectaculaire, tout est signifiant.
Cette sobriété paie. Plutôt que de multiplier les cinématiques héroïques, le jeu favorise les micros-moments : négocier trois pansements contre un filtre à eau; choisir de partager un bol de soupe pour gagner un contact; risquer un détour nocturne pour éviter une faction nerveuse. On s’attache moins à un grand récit qu’à la somme de petites décisions, ce qui rend chaque session mémorable.
Boucle de gameplay : survivre d’abord, gagner ensuite
La boucle centrale combine exploration, furtivité, combat parcimonieux et gestion d’une base évolutive. L’exploration est tendue : l’endurance fond quand vous portez trop; la faim et la soif affectent la visée; la météo change la donne (brouillard qui réduit la vision, pluie qui couvre vos pas mais refroidit votre personnage). Les zones « riches » en ressources sont rarement désertes, et l’IA des ennemis – humains comme infectés/maraudeurs – reste assez réactive pour vous pousser à contourner plutôt qu’affronter.
Le combat est volontairement lourd. Les armes improvisées ont du recul, les tirs ratés coûtent cher, et l’option furtive n’est pas une facilité mais une nécessité. Deux balles bien placées valent mieux qu’un chargeur vidé en panique. Les rencontres deviennent des puzzles : qui neutraliser d’abord, où placer un piège artisanal, quand se replier? Ce rythme anti-spectaculaire renforcera la satisfaction de s’en tirer sans casse… ou frustrera ceux qui attendent un shooter plus direct.
Côté crafting, Survival After War mise sur la rareté intelligente. On ne fabrique pas cent objets, on fabrique le bon objet. Un filtre améliore la potabilité de l’eau au camp; une amélioration de sac change votre rayon d’action; un silencieux artisanal permet une incursion en plein jour. Le jeu récompense la planification : avant chaque sortie, on choisit un « kit » (médical, repérage, combat, troc) et on vit avec les conséquences. Une bonne idée : le poids moral. Accepter une mission de sauvetage au lieu d’un raid de ressources vous prive potentiellement d’un loot immédiat mais renforce des alliances utiles plus tard.
Progression et base
La base est le cœur du long terme. On la reconstruit module par module : dortoirs pour réduire la fatigue, potager pour la nourriture, tour de guet pour élargir la mini-carte, atelier pour des pièces avancées. Chaque amélioration consomme des ressources rares et parfois des « compétences » que l’on obtient en complétant des tâches de faction. C’est ici que le jeu déploie ses meilleurs dilemmes : améliorer l’atelier pour fabriquer des munitions ou investir dans une clinique rudimentaire ? Héberger des réfugiés (main-d’œuvre potentielle) au risque de faire grimper la consommation ?
La progression du personnage reste mesurée, axée sur des perks pratiques plutôt que des super-pouvoirs. On stabilise sa visée, on apprend à recycler plus efficacement, on débloque une posture de furtivité moins bruyante. La montée en puissance existe, mais le monde reste dangereux, même après des dizaines d’heures. C’est cohérent avec le thème : on devient plus malin, pas invincible.
DualSense, audio et technique
Sur PS5, Survival After War tire bien parti de la DualSense. Les vibrations sont fines : gouttes de pluie sur la tôle, souffle irrégulier quand la stamina déraille, grattement d’une corde de piège. Les gâchettes adaptatives ajoutent un grain aux armes improvisées : un pistolet bricolé résiste, une arbalète se tend avec un point de rupture. Ce n’est pas du gadget; ça renforce la physicalité. Le 3D audio complète la panoplie : entendre un chien errant renifler derrière un grillage ou le cliquetis de bouteilles dans une ruelle change vos trajectoires.
Techniquement, le jeu privilégie une direction artistique crédible et texturée plutôt qu’une débauche d’effets. Les environnements sont sales mais lisibles, la lumière naturelle évolue de façon crédible, et les intérieurs racontent des histoires sans surcharger l’écran. Les temps de chargement sont courts, ce qui rend les allers-retours au camp moins pénibles. On note toutefois des petites heurts : quelques pop-ins sur des éléments secondaires, des PNJ qui se télescopent aux heures de pointe d’un camp, et un pathfinding qui panique à l’occasion. Rien de rédhibitoire, mais ça grince.
Quête et écriture
Plutôt que des quêtes « parc d’attractions », le jeu propose des objectifs à ramifications modestes mais crédibles : escorter une caravane sous la pluie, négocier l’accès à un puits, sécuriser un dispensaire, libérer un passage pour des marchands. Les choix ne bouleversent pas le monde, mais ils modulent vos relations, vos prix au troc, l’accès à certains ateliers ou la présence d’alliés lors d’expéditions risquées. L’écriture évite les grandes tirades sur la nature humaine et préfère des échanges secs, parfois mesquins, souvent pragmatiques. C’est moins flamboyant que d’autres productions, mais plus cohérent avec l’économie de la survie.
Accessibilité et ergonomie
Le jeu fait des efforts appréciables : plusieurs tailles d’UI, options pour l’intensité de la caméra, assistance à la visée réglable, et un mode « lecture distante » des notes via un journal audio. L’inventaire, lui, reste volontairement contraignant : la gestion du poids et des poches ralentira ceux qui aiment looter sans réfléchir, mais c’est aussi ce qui donne sa saveur au gameplay. On aurait aimé quelques presets d’équipement supplémentaires et un tri plus rapide par rareté/usage.
Ce qui fonctionne vraiment
Survival After War maîtrise la lenteur. Chaque minute compte, chaque détour a un coût. On s’approprie un quartier, on apprend ses impasses, ses toits accessibles, ses grilles déformées. Quand on revient plus tard avec un meilleur sac et deux alliés, on lit l’espace différemment. Le jeu tisse ainsi un lien fort entre le joueur et les lieux, ce qui manque souvent aux open worlds plus généreux mais interchangeables. À cela s’ajoute un métagame plaisant : voir son camp se transformer, sentir que les visages qui s’y croisent doivent quelque chose à vos choix.
Là où ça coince
Cette même lenteur peut tourner au labeur. Les premières heures, surtout, demanderont de l’abnégation. Le jeu ne tient pas beaucoup la main : les ressources sont chiches, les tutoriels parcimonieux. Certains apprécieront, d’autres décrocheront avant que la base ne prenne forme. Le bestiaire humain finit aussi par se répéter – patrouilles, snipers, raiders – et les variations d’armes improvisées, bien que cohérentes, ne renouvellent pas toujours les sensations en milieu de partie. Enfin, quelques pics de difficulté liés au hasard (spawn d’ennemis pendant une extraction, météo défavorable) peuvent donner l’impression d’être puni pour avoir tenté… de survivre.
Au final...
Survival After War n’essaie pas d’être le plus bruyant ni le plus spectaculaire des jeux de survie. Il choisit la voie de la granularité, du concret, du « je reviens vivant parce que j’ai planifié ». Sur PS5, la DualSense et l’audio 3D renforcent cette matérialité, et la gestion de base donne un but clair à l’accumulation de bouts de ficelle. Oui, il est austère, parfois rugueux, souvent avare. Mais quand on accepte ses règles, il devient addictif : chaque excursion est une petite histoire, chaque retour au camp une victoire.
Atmosphère post-apo crédible, narration environnementale soignée et cohérente.
Boucle survie-crafting exigeante mais gratifiante, décisions qui comptent vraiment.
Excellente utilisation de la DualSense et du 3D audio pour l’immersion.
Démarrage austère et tutoriels minimalistes : courbe d’apprentissage abrupte.
Répétitivité de certains affrontements et arsenal bricolé qui se renouvelle lentement.
Petits accrocs techniques (pop-in, pathfinding) et ergonomie d’inventaire perfectible.