Premier cercle : Le Contexte
Supergiant Games avait déjà marqué le monde du jeu indépendant avec Hades, une fresque mythologique et un roguelike d’une intensité rare. Revenir avec une suite directe n’était pas sans risque : comment surpasser un jeu qui avait déjà atteint l’excellence ? Hades II choisit la voie la plus délicate : celle de l’évolution subtile mais profonde. Ici, on ne contrôle plus Zagreus, le fils d’Hadès, mais Mélinoé, sa sœur cadette, figure méconnue de la mythologie grecque, associée aux Enfers et aux rites nocturnes.
Dès les premières minutes, le ton est donné : plus sombre, plus mystique, plus chargé en occultisme. L’histoire s’articule autour de la lutte contre Chronos, le Titan du Temps, qui menace l’équilibre cosmique. Là où le premier opus jouait sur la rébellion familiale et l’humour mordant des dialogues, Hades II installe une ambiance plus grave, presque tragique, sans pour autant perdre le charme des répliques cinglantes et des échanges avec les divinités de l’Olympe.
Le choix de Mélinoé n’est pas anodin : elle apporte un regard neuf sur l’univers, un mélange de fragilité et de puissance, et sa quête est teintée d’un symbolisme plus mystique que celle de Zagreus.
Deuxième cercle : Le Combat
Si le premier Hades brillait par son gameplay nerveux, la suite affine chaque détail. Mélinoé possède un arsenal magique qui se distingue radicalement des armes de Zagreus. La clé du combat, c’est l’usage des rituels et incantations, qui ajoutent une dimension stratégique au rythme frénétique.
Les armes principales (faux, dagues rituelles, bâton lunaire…) s’accompagnent de sorts magiques qui consomment de l’énergie. Cette mécanique transforme l’approche : on alterne entre attaques physiques rapides et invocations de pouvoir. Chaque affrontement devient un ballet où l’on jongle avec les ressources.
Les bénédictions divines reviennent, bien sûr, mais elles s’élargissent : Artemis, Hécate, et d’autres divinités plus occultes s’invitent aux côtés des dieux plus connus. Les synergies sont encore plus folles qu’avant : il n’est pas rare de découvrir des combinaisons inédites après plusieurs dizaines d’heures de jeu.
Ce qui impressionne, c’est la fluidité du système : malgré la complexité croissante, Hades II ne perd jamais son accessibilité. Chaque mort devient une leçon, chaque run une opportunité de découvrir un nouvel angle. La profondeur tactique atteint un niveau rarement vu dans un roguelike.
Troisième cercle : La Beauté des Enfers
Supergiant Games est reconnu pour son art direction unique, et Hades II ne fait pas exception. Les décors, plus variés et plus sombres, plongent le joueur dans un univers visuel presque hypnotique.
Les environnements changent de registre à chaque palier : des forêts lunaires hantées, des ruines baignées de lumière verte, des abysses infernaux où le temps semble figé. Chaque tableau respire la minutie, chaque couleur a un sens. Les animations, elles, atteignent une fluidité qui rend le combat encore plus jouissif.
Mélinoé elle-même est magnifiquement animée, et sa gestuelle rituelle donne une aura particulière à ses actions. Les ennemis, quant à eux, bénéficient d’un design varié et terrifiant : des spectres translucides aux colosses titanesques.
L’interface conserve l’élégance du premier jeu, mais gagne en lisibilité. Les informations cruciales (santé, magie, bénédictions) sont intégrées de manière plus fluide, évitant la surcharge visuelle.
Quatrième cercle : Les Échos
On ne peut parler de Hades II sans évoquer son ambiance sonore. La bande-son de Darren Korb, compositeur attitré du studio, franchit un nouveau cap. Plus sombre, plus atmosphérique, elle jongle entre des riffs de guitare nerveux et des nappes sonores mystiques.
Chaque combat est soutenu par une énergie musicale qui colle parfaitement à l’action, tandis que les zones plus calmes baignent dans des mélodies presque inquiétantes. Le contraste renforce l’immersion.
Le doublage, lui, conserve cette qualité exceptionnelle. Chaque divinité a une voix unique, immédiatement reconnaissable, et les dialogues sont chargés d’émotion. Mélinoé se distingue particulièrement : sa voix mêle détermination et fragilité, renforçant l’attachement du joueur à son destin.
Les effets sonores — impacts, incantations, cris ennemis — sont ciselés au millimètre. Rien n’est laissé au hasard, et chaque son participe à la cohérence globale.
Cinquième cercle : Le Temps et la Rejouabilité
Un roguelike vit ou meurt par sa capacité à donner envie de recommencer encore et encore. Sur ce plan, Hades II est une réussite éclatante.
Chaque run diffère, non seulement par la disposition des niveaux et les bénédictions, mais aussi par les événements scénaristiques. Les dieux ne répètent pas mécaniquement leurs répliques ; ils réagissent à nos choix, nos victoires, nos défaites. Ce système narratif dynamique reste un tour de force, rendant l’histoire vivante malgré la répétitivité inhérente au genre.
Le contenu est massif : des dizaines d’armes et de sorts, des centaines de bénédictions, des boss redoutables, et surtout, un hub central qui évolue au fil du temps. Les discussions avec les personnages secondaires apportent une richesse supplémentaire, et chaque retour à la base devient presque aussi plaisant qu’un run lui-même.
En termes de durée de vie, on parle facilement de plusieurs dizaines d’heures avant d’avoir l’impression d’avoir tout vu, et encore davantage pour les perfectionnistes qui veulent débloquer chaque secret.
Descente finale : Jugement des Enfers
Hades II n’est pas qu’une suite. C’est une réinvention, une descente plus profonde dans les abysses mythologiques. Plus sombre, plus riche, plus exigeant, il réussit à garder l’essence du premier jeu tout en proposant une nouvelle identité.
La magie de Supergiant, c’est de transformer une boucle répétitive en un voyage émotionnel et esthétique. Ici, chaque échec n’est pas une punition, mais une porte vers une nouvelle découverte.
+ Un gameplay raffiné mêlant combat physique et incantations magiques, offrant une profondeur stratégique incroyable.
+ Une direction artistique sublime, encore plus variée et hypnotique que dans le premier opus.
+ Une narration dynamique et immersive, qui donne une véritable âme à chaque run.
- Difficulté parfois abrupte qui peut décourager les nouveaux venus au genre roguelike.
- Certaines mécaniques magiques peuvent sembler confuses lors des premières heures, demandant un temps d’adaptation.
- Une impression de déjà-vu pour ceux qui attendaient une rupture radicale par rapport au premier Hades.
Une descente en Enfer somptueuse, exigeante et inoubliable.