Date de sortie : 11 juillet 2025
Développeurs : Source Byte et Nikodem Świder
Éditeur : SOURCE BYTE SPÓŁKA Z OGRANICZONĄ ODPOWIEDZIALNOŚCIĄ
Plates-formes : PS5
Genres : Horreur
Prix : 13,49 $
Il existe des jeux d’horreur qui s’ancrent dans la tradition, avec leurs manoirs décrépis, leurs jump scares bien huilés, et leurs monstres sortis d’un livre de Lovecraft. Puis, il y a Horror Night with Tung Tung Tung Sahur — un ovni vidéoludique, étrange, claustrophobe et, par moments, génialement absurde. Ce jeu indépendant, probablement développé entre deux cauchemars et trois tasses de café turc, mérite qu’on s’y attarde, même si ce n’est pas pour les raisons habituelles.
Une ambiance dérangeante comme nulle part ailleurs
Le jeu s’ouvre sur une séquence d’introduction volontairement floue, presque cradingue. Une caméra VHS tremblotante, une voix off désaccordée qui prononce “Tung… Tung… Sahur” comme une incantation — et nous voilà propulsés dans un univers qui semble tout droit sorti d’une vieille cassette maudite retrouvée dans un grenier humide.
La direction artistique joue volontairement avec le kitsch et le malaise : lumières stroboscopiques, filtres sales, textures incomplètes. Et pourtant, cette esthétique volontairement “mal foutue” donne au jeu une personnalité étrange, presque lynchéenne. On n’est jamais vraiment sûr si le jeu est sérieux ou s’il se moque de nous — ce qui rend l’expérience encore plus dérangeante.
Un gameplay minimaliste… et cruel
Le cœur du gameplay repose sur l’exploration d’un bâtiment qui change de configuration à chaque partie. Couloirs sans fin, portes qui mènent vers elles-mêmes, bruitages inquiétants qui proviennent de nulle part — le jeu réussit à créer un sentiment d’oppression en permanence. Il n’y a pas de carte, pas de HUD, et très peu d’interactions. Le joueur est livré à lui-même, face à une entité appelée Tung Sahur, sorte de créature qui n’est jamais montrée clairement, mais qui vous traque sans relâche.
Chaque bruit, chaque grincement de plancher, chaque son guttural déclenche un stress intense. Le jeu vous force à tendre l’oreille en permanence, à douter de vos choix. Et parfois, sans raison, tout s’arrête. Les lumières s’éteignent. Le jeu vous regarde. Littéralement.
Tung Sahur : icône horrifique ou blague cosmique?
Difficile de décrire Tung Sahur sans spoiler les rares révélations du jeu, mais disons que cette créature est autant une menace qu’un symbole. Masquée, difforme, possédant une voix qui semble être un mélange de chant religieux ralenti et d’ondes radio distordues, elle incarne une peur ancestrale et incompréhensible. Son nom est répété en boucle par des NPCs muets ou par des radios éparpillées dans les niveaux, donnant à l’expérience un ton rituel, presque chamanique.
Et pourtant, certains éléments de son design ou de ses interventions frôlent le grotesque. À un moment, elle surgit d’un frigo. À un autre, elle danse brièvement sur une musique techno avant de disparaître dans un éclat de lumière verte. Ces moments déconcertants brisent toute logique et plongent le joueur dans un malaise permanent : suis-je encore dans un jeu d’horreur, ou dans un délire interactif?
Une narration par le silence
Pas de journal à lire, pas de cinématiques explicatives. Le joueur reconstruit l’histoire au fil de l’exploration, en observant les détails du décor : des photos brûlées, des téléviseurs diffusant des extraits de prêches religieux, des morceaux de poèmes griffonnés sur les murs. Tout semble lié à une secte, à des rituels oubliés, à une entité vénérée au nom de Tung Sahur.
Le jeu ne donne jamais de réponse claire. Il vous laisse dans le doute, jusqu’à la dernière seconde — où il vous force à faire un choix… qui n’a peut-être aucun sens.
Multijoueur? Oui, mais pas comme vous l’imaginez…
Contre toute attente, Horror Night with Tung Tung Tung Sahur propose un mode multijoueur asymétrique, bien que celui-ci soit encore expérimental. Un joueur incarne un survivant, tandis que l’autre joue le rôle de l’environnement : il peut déclencher des effets sonores, modifier la disposition des pièces, contrôler Tung Sahur de manière indirecte.
Ce mode, bien que bancal techniquement, introduit une dynamique fascinante entre paranoïa et sadisme. Le “maître du décor” peut jouer de manière subtile… ou totalement sadique. Imaginez votre ami qui, tout à coup, transforme la porte de sortie en un mur de chair suintant. Glaçant.
Techniquement instable, mais assumé
Le jeu est loin d’être un bijou technique. Bugs, ralentissements, textures qui poppent n’importe comment… tout cela peut rebuter. Mais ici, cela fait presque partie de l’expérience. Ce monde ne veut pas être poli. Il veut être sale, rugueux, suintant. Même les menus semblent vouloir vous fuir. On pourrait croire à un ARG en live, tant tout est volontairement brisé.
Conclusion
Horror Night with Tung Tung Tung Sahur est une expérience comme il en existe peu. Ce n’est pas un jeu à recommander à tout le monde. Il est exigeant, frustrant, obscur… mais diablement intéressant pour qui aime les OVNI vidéoludiques. Derrière son esthétique “cheap” et ses mécaniques déroutantes se cache une œuvre expérimentale, à mi-chemin entre le jeu vidéo, le cauchemar éveillé et la satire culturelle. Vous ne saurez jamais vraiment ce que vous venez de vivre — et c’est peut-être ça, le vrai génie du jeu.
+ Ambiance sonore et visuelle oppressante
+ Narration environnementale intrigante et non linéaire
+ Multijoueur asymétrique original et dérangeant
- Instabilité technique flagrante
-. Gameplay volontairement frustrant pour certains joueurs
- Absence quasi totale de fil conducteur narratif